Anacréon

 

La Loge parisienne de la Modération (à laquelle aurait été affilié en 1787 le peintre David) fut régulièrement constituée par le Grand Orient de France en 1784. Quand elle voulut reprendre ses travaux après la parenthèse révolutionnaire, elle choisit de changer son titre distinctif en Loge d'Anacréon (ce choix aurait-il un rapport avec la création en 1803 de l'opéra du même nom du Frère Cherubini ?)

De toute manière, qui mieux que ce poète léger, chantre de l'amour, des banquets et du bon vin (et auquel Grenier a rendu hommage par son Manuel anacréontique), pouvait symboliser la très épicurienne maçonnerie d'Empire ?

Dès le XVIIIe, Anacréon avait d'ailleurs sa place dans la mythologie maçonnique, comme l'indique ce cul-de-lampe qui conclut (p. 106) le recueil (1779) Gesammlete Freimaürer-Lieder zum Gebrauch der Loge zum Schwerdt in Riga (recueil de chansons maçonniques à l'usage de la Loge zum Schwerdt à Riga).

Ce choix fut d'abord contesté - car considéré comme trop profane - par le Grand Orient mais, à la suite d'un épisode pittoresque raconté à une page des Annales maçonniques, finalement accepté (ce dont on se souviendra encore 5 ans plus tard), si bien que la Loge reprit ses travaux le 29 juillet 1805. 

Elle compta parmi ses membres Dacosta, Nourrit, Antignac (qui lui dédia cette chanson ainsi qu'une autre), Bertin (de 1807 à 1816), Garnier, Batiste, Fasquel, le flûtiste Joseph Guillou (1787-1853), Alexandre Ferlendis, Gaveaux, Fabry Garat, Moilin, Maxime de Rédon et de Joly père et fils. Tourterelle y fut affilié et Muraire, Vénérable d'honneur (salué ici à ce titre par Maxime de Rédon et ici par Jules de Joly).

Des stances pour le deuil de Montaleau y ont été chantées, ainsi qu'une chanson de Désaugiers. Elle est également citée dans une chanson de Legret.

Nous connaissons également :

Ci-dessous : médailles, avec la devise de la Loge les Arts, l'Amitié, les Dames.

Un Chapitre, constitué en 1813, y était attaché, dont Cambacérès, Roettiers de Montaleau (fils) et le Comte Muraire étaient membres d'honneur.

Grenier a écrit un obséquieux Compliment qu'il a prononcé le jour de l'installation du Frère Muraire, vénérable d'honneur de la Loge, le 15 janvier 1806.

Comme on peut le voir ici, elle avait également une Loge d'Adoption.

L'affiliation de la loge de l'Age-d'Or à celle d'Anacréon a fait l'objet de Couplets publiés en 1807.

En 1811, la Loge malouine de la Triple Essence s'y affilia.

                               

L’Affiliation Lyrique et Anacréontique

Selon Christine Gaudin dans l'ouvrage Dieu(x) et hommes : histoire et iconographie des sociétés païennes et chrétiennes de l'Antiquité à nos jours coordonné par Sylvie Crogiez-Pétrequin, une société dénommée L’Affiliation Lyrique et Anacréontique était souchée sur la Loge Anacréon et réunissait des graveurs, peintres, statuaires et chanteurs lyriques comme Garat, Nourrit et Gavaudan (on voit ici que c'était également le cas de Platel et ici de Moilin). A l'entrée violon de l'Encyclopédie de la Franc-maçonnerie par divers auteurs sous la direction d'Eric Saunier (Pochothèque, 2000), la même Christine Naslin signale qu'un frère, également violoniste, de Rodolphe Kreutzer en fut membre de 1808 à 1816.

Cette société, à laquelle fut affilié le très jeune Tourterelle fils, est effectivement mentionnée aux Statuts et Réglements de la Loge imprimés en 1808 (et dont est tirée l'image ci-contre) :

  • Art. IV. La Loge se compose :
    ...
    5°. De membres Affiliés, sous le titre d'Affiliation Lyrique et Anacréontique.
    ...
  • Art. VIII. Les MEMBRES composant l'AFFILIATION LYRIQUE et ANACRÉONTIQUE sont ceux qui, à raison de leurs talens, ou en récompense de services rendus, sont admis à faire partie de la Loge et portés sur son tableau au titre, et dans les formes prescrites par le réglement. Ils ne sont soumis à aucun droit d'entrée ni de cotisation, excepté celle due à la caisse des pauvres.
  • Art. CLXXXVI. La Loge d'ANACRÉON admet, sous le titre d'Affiliation Lyrique et Anacréontique, ceux des Frères qui, par leurs talens, leurs lumières, ou leurs travaux dans la Loge, comme anciens Fondateurs, ou à tout autre titre, ont bien mérité de l'Atelier, et peuvent encore lui donner des preuves de zèle, d'intérêt et de dévouement.
    Art. CLXXXVII.
    Les Frères portés sur le tableau mentionné en l'article précédent, jouissent, dans la Loge, de toutes les prérogatives des autres Membres.
  • Art. CCLII. La Loge a une Commission Lyrique et Anacréontique.
    Art. CCLIII. Cette Commission se compose de sept Frères Maîtres, choisis parmi les Membres de l'Affiliation Lyrique et Anacréontique, ils sont élus de la même manière que ceux composant la Commission des Finances.
    ...
    Art. CCLVIII. Les attributs de la Commission sont l'examen, la rédaction, l'exécution des travaux en tout genre, concernant les Arts et Beaux-Arts.
    Les chants ; — les décorations ; — l'harmonie ; — toutes les compositions d'agrément ; les rédactions des programmes, et leur exécution, sont réservés à cette Commission, qui se concerte à cet effet avec le Vénérable, et avec les Ordonnateurs spéciaux que la Loge a nommés.
    Art CCLIX. Les Frères, membres de l'Affiliation Lyrique et Anacréontique, sont tous, sans exception, à la disposition de la Commission. Elle les appelle dans son sein, elle les consulte et leur délègue les travaux particuliers dont la Commission croit devoir se reposer sur eux.

Retour au sommaire des Loges :

Retour à l'entrée du musée :