Hommage lyonnais à Lafayette (1929)

Cliquez ici (midi) ou ici (mp3) pour entendre l'air, séquencé par Alain la Cagouille

Nous avons trouvé, à la p. 379 de l'ouvrage de Kauffmann et Cherpin Histoire philosophique de la franc-maçonnerie, ces couplets du Frère César Berthelon, chantés le 6 septembre 1829 (qui se trouvait être le jour de l'anniversaire du héros) au banquet suivant la grande fête maçonnique offerte au Frère général Lafayette accompagné de son fils, fête à laquelle participaient 13 Loges (de Lyon, des environs et de plus loin : Paris, Lille, Genève).

Kauffmann et Cherpin, qui reproduisent ces couplets en tant que témoignage de l'esprit des loges à cette époque, précisent que tous les assistants en répétèrent le refrain avec enthousiasme.

Histoire philosophique de la franc-maçonnerie

L'Histoire philosophique de la franc-maçonnerie est un ouvrage de Kauffmann et Cherpin paru à Lyon en 1850.

En 1859, Ulbach en a écrit dans le n° 12, avril 1859, du journal le Monde maçonnique : Nous ne saurions donc recommander trop vivement le livre des Frères Kauffmann et Cherpin à tous les Maçons qui vont dans les Loges pour y entendre autre chose que des coups de maillet, et pour y voir briller autre chose que des lumignons sur des cierges de bois.

Kauffmann et Cherpin étaient aussi les dirigeants de la Revue maçonnique.

Kauffmann 

A. Sébastien Kauffmann (1800-1868) est un écrivain, poète, chansonnier, pamphlétaire, auteur dramatique et historien lyonnais. En 1838, il  est Orateur et en 1847 Vénérable de la loge lyonnaise Equerre et Compas

Cherpin 

Gallica (qui considère logiquement qu'il s'agit de la même personne) donne Jean-Claude Cherpin (1806-1875) comme le coauteur de l'ouvrage et Joannes Cherpin comme directeur de la Revue maçonnique de Lyon et du Midi ; bizarrement, le fichier Bossu présente comme tel un Charles Cherpin, homme de lettres, membre honoraire de la Clémente Amitié à Paris, ou un Joannes Cherpin, membre de la loge lyonnaise du Parfait Silence, mais mentionne également un Jean-Claude Cherpin, marchand de vin, membre de la loge lyonnaise de l'Etoile polaire.

Cherpin est également l'auteur de l'Arche Sainte.

Voir ici sur l'air J'ai pris goût à la république (dont le choix n'est évidemment pas dépourvu de signification).

Air : J'ai pris goût à la république.

 

Il a paru... lève-toi, jeune France ;
De tes accents le ciel doit retentir,
Accueille en lui, toi riche d'espérance,
Le reste pur d'un noble souvenir.
L'arbre qui croît sur les rives fécondes,
En d'autres temps, c'est lui qui l'a planté ;
Salut, salut à l'homme des deux mondes,
Au père de la liberté.

 

De l'univers assoupi sous sa chaîne,
Bien jeune encore, il hâta le réveil,
Et de Boston aux rives de la Seine,
D'une autre époque alluma le soleil.
Si, dégagés de ténèbres immondes,
Nous grandissons à sa douce clarté,
Rendons-en grâce à l'homme des deux mondes,
Au père de la liberté.

 

Entendez-vous sur un autre rivage
D'un peuple entier les tumultueux flots,
Heureux, puissants, libres par son courage.
D'un cri d'amour poursuivre le héros ?
Ce cri sublime a traversé les ondes,
Et sur nos bords il sera répété :
Salut, salut à l'homme des deux mondes,
Au père de la liberté.

Lafayette

Adulé aux Etats-Unis (qui ne se souvient du La Fayette, nous voilà ! attribué au général Pershing en 1917) où de nombreuses Loges portent son nom, le héros des deux mondes est un des personnages les plus attachants (mais aussi les plus controversés) de l'histoire de France.

On peut trouver ici un résumé de sa carrière tant maçonnique que profane, laquelle a aussi été décrite en 1937 par André Lebey.

En France également, il a été l'objet d'une véritable vénération dans les Loges en tant que porte-étendard de la liberté, particulièrement après la Restauration. Après son triomphal voyage en Amérique (1824-5), il s'affirme comme opposant à Charles X et, après l'avènement du ministère Polignac en 1929, il dynamise lors de ses voyages en province l'opposition libérale, avant de jouer un rôle décisif dans le renversement du roi lors des 3 Glorieuses et son remplacement par Louis-Philippe.

Parmi ces voyages, la visite à Lyon en septembre 1929 fut particulièrement étincelante. Le lendemain de la fête maçonnique dont on trouve un écho ci-dessus, Lafayette fut l'hôte d'un banquet organisé par le parti libéral, au cours duquel il prononça les paroles suivantes : 

Je suis fier et heureux que mon passage dans cette grande et patriotique cité ait été pour elle une occasion de plus pour manifester sa constante haine de l'oppression, son amour de la véritable liberté, sa détermination de résister à toutes les tentatives de l'incorrigibilité contre-révolutionnaire.

La Fayette sera encore particulièrement honoré après les Trois Glorieuses, notamment à Paris le 10 octobre 1830.

 On peut trouver aussi sous la signature de Bouilly le poème hommage du Grand Orient de France au Général Lafayette commençant par Salut, Nestor de la maçonnerie ! Salut au fondateur de notre liberté !

Une page du blog a été consacrée au même sujet le 17 novembre 2017.

Dans son Histoire des trois Grandes Loges de francs-maçons en France (pp. 142-3), Rebold évoque ce séjour lyonnais :

Une réunion eut lieu à Lyon, au mois de septembre, dans le local de la loge des Enfants d’Hiram, des membres et des députés des loges la Sincère Amitié, l’Équerre et le Compas, Union et Confiance, les Enfants d’Hiram, la Candeur, l’Asile du Sage, l’Étoile Polaire, à l’Orient de Lyon ; la Franche Amitié, Orient de Saint-Étienne ; la Parfaite Union, Orient de Vfllefranche ; l'Amitié, Orient de Genève ; la Fidélité, Orient de Lille, à l’effet de recevoir le F. Lafayette, vétéran de la liberté, représentant dévoué des principes de la franc-maçonnerie, qui venait d’arriver dans cette ville, de retour de la tournée qu’il avait faite dans le midi de la France, après l’avènement du ministère Polignac, dans le but de préparer la nation à la résistance et à la revendication de ses droits. La marche de ce soldat de l‘indépendance n'avait été qu'une série d'ovations, et le parti libéral de Lyon venait à son tour de lui donner une fête brillante, à laquelle toute la population s’était associée avec enthousiasme. Il était juste que les maçons de Lyon offrissent aussi à l’illustre voyageur le tribut de leur reconnaissance, de leur admiration. Le F. général Lafayette et son fils furent reçus dans cette imposante assemblée avec les honneurs qui leur étaient dus. On les décora d’insignes et de bijoux de maîtres, sur lesquels leurs noms étaient gravés. Le général Lafayette fit une profession de foi digne du grand patriote et du loyal maçon ; elle fut vivement applaudie.

3 maçons : La Fayette et Washington, statue (1895) de Bartholdi (Paris, square des Etats-Unis)

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