Cantique du Frère Bidault

 

Cette chanson est une des nombreuses qui ont été interprétées lors de l'inauguration de la Loge bruxelloise des Amis Philanthropes, le 1er décembre 1798.

Il s'agit, selon la Planche tracée de cette inauguration (p. 30) d'un cantique sur des paroles du Frère Bidault (celui-ci, qualifié par ailleurs de nouvellement initié, est le même jour l'auteur de deux autres chansons, celle-ci et celle-là) et sur l'air du Trio de Félix ; il fut interprété après que le Frère Legret ait chanté 3 couplets de sa composition, ces deux chansons ayant servi à ponctuer la 3e santé (celle du Vénérable).


 

 

On sait qu'Argus ou Argos, dit Panoptès (c'est-à-dire celui qui voit tout), est un personnage mythologique doté de cent yeux.

Le trio de Félix

Félix ou l'enfant trouvé est une comédie (1777) de Sedaine et Monsigny, dont le Trio (ci-contre, le début d'une partition) eut beaucoup de succès.

Dans la Revue de Paris en 1840, Castil-Blaze raconte à son sujet la charmante anecdote suivante :

Monsigny, maître d'hôtel du duc d'Orléans, compose son trio de Félix en se promenant dans un salon du Palais-Royal ; une heure après il part pour la campagne. On l'attendait à dîner ; il se met à table, et, joyeux, il raconte sa bonne fortune, comme quoi il a trouvé des motifs charmans, un ensemble délicieux pour son trio, morceau capital de l'opéra qu'il met en musique. Toute l'assemblée demande à connaître ce trio qui devait assurer le succès de Félix. Après le café, les instances redoublent ; Monsigny se met au clavecin, tout le monde est debout auprès de lui pour recueillir les premiers accens d'une musique dont les accords n'ont encore charmé l'oreille de personne. Le diamant va briller, la fleur va éclore, le fruit donner sa primeur ; les amateurs retiennent leur haleine, intentique ora tenebant. C'est ainsi que Virgile représente la cour de Didon au moment où le pieux Énée va commencer le récit de ses aventures. L'espérance du seigneur châtelain et de ses convives fut complètement trompée. Monsigny ne commença rien du tout : son trio s'était évanoui ; l'auteur désappointé n'en retrouva pas une note ; il fallut bien se passer de l'exhibition tant désirée. Monsigny, désespéré d'avoir ainsi perdu son invention, le trio dont il était si content, et qu'il savait apprécier mieux qu'un autre, ne put dormir un instant de la nuit. Les yeux ouverts, immobile ou bien agité dans son lit, il cherchait son trio, le demandait à sa mémoire qui s'obstinait à le refuser. Au moment où les premiers rayons de l'aube ramènent le jour, il s'habille, prend sa canne et son chapeau ; le voilà parti, le voilà retournant à Paris à pied. Une idée l'a frappé ; cette idée est folle peut-être, mais elle occupe son esprit ; il obéit à l'impulsion qu'elle lui donne.

Monsigny rentre au Palais-Royal, se hâte de s'installer dans le salon où il était la veille ; il s'y promène d'un angle à l'autre, comme il l'avait fait, s'inspire des objets qu'il avait contemplés, suit sa marche ou s'arrête sur certaines fleurs ou rosaces du tapis ; ses pieds retrouvent bientôt le rythme et la cadence du trio. Ce premier dessin ressaisi, la mélodie vient scintiller sur le miroir de sa mémoire, les nuages dont il était obscurci se dissipent peu à peu, le trio de Félix est enfin rendu à son auteur. Monsigny, cette fois, s'était muni de papier réglé. La mélodie est à l'instant arrêtée, tracée par la plume. Le musicien retourne à la campagne, arrive au château, fier de sa conquête, et son manuscrit à la main.

Sous les auspices de la Chaire Verhaegen (chaire de maçonnologie de l'Université Libre de Bruxelles), a eu lieu le 27 mars 2012, après une conférence de Pierre-Yves Beaurepaire, un concert de musique maçonnique du XVIIIe siècle donné par Le Petit Sablon consort sous la direction de Thibaut Lenaerts. Ce concert a notamment été l'occasion d'entendre la chanson faisant l'objet de la présente page. 

M. Fabian Balthazart, doctorant de l'ULB (boursier mini-arc), a eu l'amabilité de nous communiquer la partition qu'il a réalisée pour cette circonstance et de nous autoriser à la mettre à votre disposition. 

Vous en voyez ci-contre (en réduction) la première page. 

Cliquez ici pour la consulter au complet (pdf de 8 pages).

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