Les médailles de récompense 1839

 Cliquez ici pour entendre un MP3 de l'air Jeunes amans, cueillez des fleurs mentionné au bas de cette page

Nous avons trouvé cette chanson à la p. 260 du recueil du Tome 2 (1840) du périodique maçonnique Le Globe.

Le 30 octobre 1838, le Grand Orient de France avait pris un Arrêté instituant des médailles de récompenses en faveur des Ateliers et des Maçons qui, par leurs actes, leurs talens ou leurs services, auront bien mérité de la Franc Maçonnerie, à savoir par des services éminens rendus à l'Ordre maçonnique ; par des actes de vertu, de philanthropie ou de dévouement ; par des institutions utiles ou par des travaux littéraires et scientifiques relatifs à la Maçonnerie.

C'est au cours de la Fête de l'Ordre du 27 décembre 1839 qu'eut lieu la première distribution annuelle de telles médailles.

 

Nous ignorons si la médaille de récompense ci-contre est bien celle instituée par cet arrêté.

Le Globe nous donne un écho de cette cérémonie, vue non pas à travers la froideur d'un tracé officiel, mais par l'oeil enthousiaste d'un membre (le Frère Delahaye, qui, le 30 janvier 1840, en fit à la Loge un rapport très lyrique) de la Loge (Saint-Pierre des Vrais Amis) d'un des lauréats, le Frère Perin (dont le fils avait été initié dans cette même Loge ce même 30 janvier).

Les cinq autres lauréats étaient (en italiques, les commentaires de Delahaye) :

Quand au Frère Perin lui-même - et c'est évidemment à lui que Delahaye consacre la plus longue partie de son discours - ses mérites sont d'une part d'avoir, quatre fois dans sa vie (une fois dans son adolescence à Rethel, une fois en 1809 pendant son service militaire, et deux fois par la suite à Paris), sauvé quelqu'un de la noyade, et d'autre part d'avoir recueilli et élevé de nombreux orphelins. C'est le seul des six lauréats à avoir recueilli l'unanimité des membres de la Commission de sélection.

Dans le même recueil du Globe, on trouve d'ailleurs (pp. 85-94) une description plus officielle des mérites de ces lauréats, sous forme du discours du rapporteur de la Commission des récompenses lors de la Fête de l'Ordre précitée. Ce discours - qui, soit dit en passant, n'attribue à Perin que les deux premiers des sauvetages évoqués par Delahaye - nous apprend aussi que le Frère Descous créa dès 1832 les premières Loges de l'Algérie récemment conquise.

Non content d'avoir fait son rapport, le Frère Delahaye le compléta par un cantique de son cru, dont chacun des couplets est dédié à l'un des six lauréats :

 CANTIQUE

 

Chanté le jour de la fête d'Ordre du solstice d'hiver, à la loge chapitrale Saint-Pierre des Vrais Amis, à l'occasion de la distribution des médailles du Grand-Orient de France.

 

Paroles du frère Delahaye.

 

Au sage Nestor des Maçons,
Chéri de la grande famille,
Qui fit tant aimer ses leçons
Avec les Contes à ma fille ;
A l'auteur du drame attachant
Du Philanthrope de Versaille ;
Mes frères, du Grand-Orient
A Bouilly donnez la médaille.

 

Au Pythagore de nos temps,
S'il est encor des philosophes,
Au savant frère Des Étangs,
Qui fit école aux Trinosophes ;
Pour tous ceux qui sous son maillet
Apprirent comment on travaille,
Donnez, pour tout ce qu'il a fait,
A Des Étangs une médaille.

 

A ce Maçon, votre soutien,
Et de l'Ordre entier la ressource,
Qui, vingt ans, a tenu si bien
Et votre plume et votre bourse ;
Qui, vainqueur ou vaincu, toujours
Coucha sur le champ de bataille ;
A ce frère de bon secours,
A Morand donnez la médaille.

 

Aux frères d'Isis-Montyon,
En qui le feu sacré réside,
Si dignes de ce double nom,
De cette double et noble égide ;
Aux Maçons qui de la vertu
Que le monde profane raille
Prêchent le culte méconnu,
Mes frères, donnez la médaille.

 

Au médiateur de la paix
Qui vint sur le sol de l'Afrique
Planter près du drapeau français
Une bannière maçonnique :
Utile et généreux colon,
Qui sut ajouter une maille
A notre chaîne d'union,
A Descous donnez la médaille.

 

A ce brave enfant de Rethel,
Qui, dès son début dans la vie,
Grandit tout d'un coup sur l'autel ...
L'autel sacré de la patrie;
A l'heureux ami de Benoits
Donnez ... mais tout mon corps tressaille !
Donnez ... ah ! je n'ai plus de voix ...
A Perin donnez la médaille. 

Le Benoist mentionné au dernier couplet est celui sauvé par Perin en 1809 : depuis, il était devenu membre de la Loge, et y avait d'ailleurs parrainé Perin.

L'air n'est malheureusement pas mentionné.

Nous ignorons combien de temps perdura cet usage des médailles de récompenses ; nous avons trouvé trace ici et ici de la distribution de décembre 1840, avec deux bénéficiaires seulement. 

Ce document-ci, qui rappelle ces attributions, mentionne aussi les 4 bénéficiaires de 1841, les 3 de 1842 (dont Louis Brune), les 3 de 1844 (il n'y en avait pas eu en 1843 faute de candidatures proposées par les Ateliers), les 3 de 1845, les 3 de 1846 et les 3 de 1847. La Revue maçonnique de Lyon donne ici un écho de la cérémonie de 1844. 

Et l'on trouve au Calendrier Maçonnique du Grand-Orient de France pour 5852 (pp. 154-9) une liste de 42 bénéficiaires entre 1839 et 1851.

Le cantique fut repris, sous le titre Les Médailles du Grand Orient, en 1843 (p. 18) dans le recueil des chansons de Delahaye édité par sa Loge, mais ici un air est mentionné : Du preux sans reproche et sans peur. Il s'agit d'une Cantate sur le retour des Bourbons (musique de Persuis), qui d'après cette page peut aussi se chanter sur l'air de Jeunes amans, cueillez des fleurs.

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