Loge d'Adoption en Pologne

Cette pièce est le n° III du recueil Pieśni wolnomularskie (chants maçonniques) publié à Varsovie par Elsner en 1811.

Chant, à l'occasion de l'ouverture de la loge d'adoption des Soeurs

 

Poème du Frère Dmuszewski, musique du Frère Elsner.

 

Bienvenue, soeurs de liberté,
Bienvenue dans le Temple de la grâce,
Que les mains de l'entente sacrée
Ont édifié pour le bien de l'univers.

Présentez avec les frères les offrandes,
Socle de vertu des autels,
Et déposez-y vos dons :
Qui ornent les Francs-Maçons.

Comme un rayon de beau temps,
Qui paraît plus doux après l'orage,
Ainsi, Soeurs de liberté,
Grandit ici votre vertu.

Voici votre titre de gloire :
Filles reconnaissantes, tendres mères,
Bonnes dames, épouses fidèles,
Sarmates aimant leur pays.

Le dernier couplet qualifie les bonnes citoyennes polonaises de Sarmates.

Sarmates

Les Sarmates sont un ancien peuple scythique de nomades des steppes, dont les aristocrates polonais se sont considérés comme les descendants. On peut lire dans Wikipedia que un mouvement culturel polonais, appelé sarmatisme, fondé sur l'ancienne croyance selon laquelle la Szlachta (noblesse polonaise) avait une origine sarmate se répandit de la fin du XVIe jusqu’à la deuxième moitié du XVIIIe siècle dans la République des Deux Nations. Cette culture, baroque, eut une influence considérable sur les mœurs et l'idéologie de l'aristocratie polonaise.

Un historique de la maçonnerie polonaise permet d'ailleurs de voir qu'en 1769 avait été fondée la Grande Loge du Vertueux Sarmate, qui fut reconnue par Londres en 1770.

Selon cette page, Voltaire ne voyait dans le sarmatisme qu’anachronisme mâtiné de superstitions catholiques, au contraire de Rousseau ... qui exalte la résistance des Sarmates pour défendre leur liberté.

La première Loge d'Adoption mentionnée en Pologne par le Dictionnaire de la Franc-maçonnerie de Ligou (PUF) est celle attachée à la Loge masculine Catherine à l'Etoile du Nord, vers 1779.

Le Grand Orient de Pologne, né en 1783, était proche du Grand Orient de France (qui y avait fondé des Loges à partir de 1778). Après la libération de Varsovie en 1807 par les troupes impériales françaises, cette proximité s'accentua et la création en 1810 d'un Grand Orient National se fit sous l'égide du Grand Orient de France. Les loges d'adoption polonaises étaient donc sans doute alors taillées sur le modèle français.

l'auteur : Ludwik Adam Dmuszewski

Le dictionnaire biographique des musiciens polonais et slaves, anciens et modernes par Albert Sowiński présente Ludwik Adam Dmuszewski (1777-1847) - ainsi que son épouse - comme suit (pp. 147-8) :

Portrait par Józef Hilary Głowacki (1789-1858)

DMUSZEWSKI (Louis-Adam), auteur fécond. Fut successivement artiste dramatique, directeur des théâtres de Warsovie et rédacteur en chef du Courrier de cette ville, un des bons journaux polonais. Louis Dmuszewski débuta en 1800 dans la troupe de Boguslawski ; il avait alors vingt-trois ans, étant né en 1777. Non content de recueillir des applaudissements comme acteur, il se mit à écrire des pièces pour le théâtre. Il est auteur des opéras suivants: Lesko-le-Blanc, le Roi Lokietek, Nagroda (Récompense), Cécile de Piaseczno, dont J. Elsner et Ch. Kurpinski écrivirent la musique, et d'un grand nombre de vaudevilles et de pièces détachées pour lesquelles il sut trouver l'à-propos et en assurer le succès. Beaucoup de cantates officielles sont de lui, ainsi que Pospolité ruszenié et Okopy na Pradze, espèces de mélodrames. Dmuszewski rédigea pendant longtemps le Courrier de Warsovie, lequel compte près de trente-six ans d'existence. Il publia beaucoup d'articles sur la musique et les représentations théâtrales, fort bien faits. Il était bon musicien, connaissait à merveille l'ancien répertoire polonais. II fonda, en 1837, l'Association musicale de Warsovie, pour venir en aide aux musiciens malheureux. Cette institution philanthropique, fort bien organisée, dont Dmuszewski fut président, prospéra beaucoup. Elle s'appelle en polonais Towarzystwo podupadlych Artyslow Muzycznych. Elle avait déjà, en 1850, un capital de 59,200 florins de Pologne ; son comité était composé, cette année-là, de MM. Stefani, Strybel et Nepily. Louis Dmuszewski avait de la fortune, et faisait beaucoup de bien ; remarquable par sa piété et son esprit conciliant, ce digne citoyen mourut en 1847, généralement regretté. II a laissé des Mémoires fort intéressants qui embrassent une époque remarquable par les événements politiques, depuis 1793 jusqu'en 1830. Le Courrier de Warsovie publia, en 1850, un fragment de ces Mémoires sur le théâtre d'amateurs en Pologne, qui renferme de curieux détails sur l'ancienne société polonaise. On doit à Dmuszewski une série d'articles sur la musique en Pologne, publiés dans le Courrier de Warsovie de 1820 à 1847, qui se recommandent par l'étendue des connaissances musicales de leur auteur et par la netteté des aperçus. 

[Son épouse] Sophie Pienknowska, cantatrice distinguée de l'Opéra national à Warsovie. Pendant le séjour de l'empereur Napoléon dans la capitale de la Pologne, en 1807, Mme Dmuszewska fut admirée par ce souverain victorieux dans l'opéra d'Andromède, pièce héroïque de Louis Osinski, musique de Joseph Elsner, lequel écrivit aussi une cantate pour cette circonstance. Le directeur de la troupe, Albert Boguslawski, en parlant de cette représentation, ajoute que S. M. l'Empereur des Français fut très-satisfait des chanteurs polonais, ainsi que du ballet. La mort de Sophie Dmuszewska, arrivée dans la même année, fut une grande perte pour l'Opéra polonais.

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