Ferdinand Ries

En cliquant ici, vous entendrez le début du 1er mouvement (Larghetto - allegro molto) de sa sonate op. 34 pour cor et piano, interprétée par Claude Maury et Guy Penson (CD Riccercare RIC 087062)

 

Fils de Franz Anton Ries, Ferdinand Ries (1784-1838) fut pianiste et compositeur. Il fut l'élève et l'ami de Beethoven - qui avait été l'élève de son père. Il est l'auteur d'une oeuvre abondante, comprenant des oeuvres maçonniques :

  • Bei Eroffnung der Tafellogen, pour voix, choeur d'hommes et quatuor à cordes (1810)

  • le lied (édité par Simrock) Das Fest der Maurer (incipit : Jubelt, Brüder !, diesem Feste)

Comme son père, il est signalé comme membre de la Loge de Bonn les Frères Courageux.

Certaines de ses partitions (avec un fichier midi) sont disponibles ici.

 

L'ouvrage Annuaire dramatique de la Belgique pour 1839 lui consacre la notice nécrologique suivante :

Ries (Ferdinand), est né, comme Beethoven, à Bonn-sur-le-Rhin, en 1784 ; ils complétèrent l'un et l'autre leurs études à l'école d'Albrechtsberger, à Vienne, et ainsi que son illustre compatriote, dont il devint l'élève, Ries fit son entrée dans le monde musical comme pianiste, et ne tarda pas à s'élever au plus haut degré de la composition. En 1804, Ries exécuta, à Vienne, pour la première fois, le concerto en ut mineur de son maître, et, par son exécution étonnante, il excita tellement l'admiration, qu'on le nomma le géant de son instrument (en allemand, Ries signifie géant). Il se rendit, en 1806, à Saint-Pétersbourg et de là à Londres où, en peu de temps, il s'acquit, tant par ses compositions que par son talent d'exécution, une réputation européenne. Par quelques années de travaux continus, Ries s'était fait une fortune honorablement méritée, et s'était retiré à Francfort-sur-le-Mein. Ce fut depuis cette époque que l'on vit paraître ses opéras, parmi lesquels la Fiancée du Brigand, Liska ou la Sorcière de Gyllensteen, se trouvent en première ligne. Dans un voyage qu'il fit en Italie, en 1832, Ries recueillit une ample moisson d'applaudissemens, sur toute sa route. Ses symphonies surtout jouissent d'une grande réputation en Allemagne et en Angleterre, et sont placées presque au niveau de celles de Beethoven.

L'association musicale fondée pour donner des fêtes musicales alternativement, dans les villes de Cologne, de Dusseldorf et Aix-la-Chapelle avait nommé Ries son chef, et il s'acquittait de ses fonctions avec un talent que justifiait parfaitement le choix qu'on avait fait de lui. C'est dans la dernière de ces villes, où il se trouvait momentanément, que la mort vint le surprendre.

Plus détaillée est la notice que lui consacré Fétis dans son Tome 7 :

RIES (Ferdinand), pianiste et compositeur, fils d'un directeur de musique au service de l'électeur de Cologne, naquit à Bonn, en 1784. Ses heureuses dispositions pour la musique se manifestèrent dès ses premières années : son père lui fit commencer l'étude de cet art à l'âge de cinq ans, et dans sa huitième année il devint élève de Bernard Romberg [NDLR : cousin de Andreas Romberg] pour le violoncelle ; mais l'invasion du pays par l'armée française ayant dispersé la chapelle du prince en 1793, le père de Ries, ruiné par cet événement, et sans espoir de procurer à son fils une position solide, lui fit apprendre à jouer du piano. Déjà, dans sa neuvième année, il avait écrit quelques petites compositions pour cet instrument. Le jeune Ries n'eut d'abord d'autres secours pour son instruction dans l'harmonie que quelques livres rassemblés par son père. Parvenu à sa treizième année, on l'envoya à Arnberg, en Westphalie, chez un ami de sa famille, qui s'était chargé du soin de lui enseigner à jouer de l'orgue, et les éléments de la composition; mais il se trouva que le maître était moins habile que l'élève, et que celui-ci ne put employer utilement son temps, pendant les neuf mois de son séjour à Arnberg, qu'en se livrant à l'étude du violon. De retour dans la maison paternelle, il y resta environ deux ans, occupé à mettre en partition les quatuors de Haydn et de Mozart, qu'il avait pris pour modèles, et à arranger pour le piano les oratorios de la Création, des Saisons, et le Requiem de Mozart, dont Simrock publiait des éditions. En 1801, Ries se rendit à Munich avec son ami d'Arnberg, qui bientôt l'y laissa, fort léger d'argent, mais plein d'espoir dans l'avenir, et d'énergie pour surmonter les obstacles. Cependant Munich lui offrait peu de ressources pour le but qu'il se proposait d'atteindre : quelques leçons de Winter furent ce qu'il y trouva de mieux; mais le départ de ce maître pour la France le laissa bientôt privé de ce secours, et le détermina à se rendre à Vienne. Lorsqu'il se mit en route pour cette ville, toute sa fortune se composait de sept ducats, et d'une lettre de recommandation de son père pour Beethoven, qui avait été son ami. Le grand homme justifia par la cordialité de son accueil l'espoir du jeune artiste et celui de sa famille. Devenu élève de Beethoven, Ries se livra avec ardeur au travail. Le maître ne s'était chargé que de son éducation de pianiste ; à l'égard du contrepoint, il l'avait envoyé chez Albrechtberger qui, devenu vieux, n'aurait point accepté de nouvel élève si la recommandation de Beethoven n'eût été pressante, et si l'attrait d'un ducat par leçon ne l'eût séduit. Malheureusement les ducats n'étaient pas en grand nombre dans la bourse de Ries ; après vingt-huit leçons, ses ressources pécuniaires furent épuisées, et il ne lui resta plus d'autre moyen d'instruction que les livres, et le souvenir de ce petit nombre de leçons, les seules qu'il ait reçues concernant l'art d'écrire. 

Quatre années de cohabitation avec Beethoven, son exemple et ses conseils, avaient formé le goût de Ries, et imprimé à son talent une tendance vers la grandeur et la force. En 1806, l'inflexible loi de la conscription vint l'arracher à son heureuse existence, et l'obligea à retourner en hâte à Bonn, alors au pouvoir des Français. L'armée de Napoléon qui s'avançait vers Vienne obligea le jeune artiste à faire un long détour pour se rendre à Leipsick, et à passer par Prague et Dresde. Arrivé à Coblence, il s'y présenta devant le conseil de recrutement qui devait l'enrôler comme soldat ; mais l'effroi que lui inspirait cette perspective fut bientôt dissipé, car ayant perdu l'usage d'un œil dans son enfance, par la petite vérole, il fut déclaré incapable de service. Alors il réalisa le projet formé depuis longtemps de visiter Paris. Il y fit un séjour d'environ deux ans, et y publia quelques-unes de ses meilleures compositions. En 1809 il partit pour la Russie, s'arrêtant à Cassel, Hambourg, Copenhague et Stockholm, pour y donner des concerts. Ce voyage, commencé sons d'heureux auspices, fut cependant traversé par des accidents assez graves : par exemple, le vaisseau sur lequel Ries s'était embarqué en quittant la Suède fut pris par les Anglais, qui gardèrent leurs prisonniers pendant huit jours sur un rocher avant de les rendre à la liberté. Arrivé enfin à Pétersbourg, Ries y trouva son ancien maître, Bernard Romberg, qui fit avec lui un voyage dans l'intérieur de la Russie. Ils donnèrent des concerts à Kiew, dans la petite Russie, à Riga, à Revel, et furent partout accueillis avec enthousiasme. Le projet des deux artistes était de se rendre ensuite à Moscou ; mais l'arrivée des armées françaises en Russie, et le désastre de cette capitale, qui en fut la suite, ne leur permit pas de réaliser leur dessein. Ries prit alors la résolution d'aller en Angleterre; mais avant de s'y rendre, il s'arrêta une seconde fois à Stockholm. Arrivé à Londres au mois de mars 1813, il y débuta au concert philharmonique, et y excita une vive sensation. Peu de temps après, il épousa une dame anglaise, aussi remarquable par les qualités de l'esprit que par la beauté. Dès ce moment il devint un des maîtres les plus renommés dans la capitale de l'Angleterre. Son activité prodigieuse comme virtuose, comme professeur et comme compositeur, lui fit gagner en dix années des sommes considérables. Le 3 mai 1824 il donna à Londres son concert d'adieu, où les amateurs se portèrent en foule ; puis il partit avec sa famille pour se rendre dans une propriété qu'il avait acquise à Godesberg, près de Bonn, et y vivre dans le repos. Là, il se livra à son goût pour la composition, et écrivit quelques grands ouvrages. Les embarras d'une maison de banque de Londres, où il avait placé une partie de son avoir, lui donnèrent ensuite des inquiétudes sur sa fortune ; mais il paraît que ces affaires s'arrangèrent, et que ses pertes furent peu importantes. En 1830 il fit représenter son opéra de la Fiancée du brigand, en trois actes, qui fut accueilli avec faveur dans plusieurs villes de l'Allemagne, notamment à Berlin. L'année précédente il avait fixé son séjour à Francfort. En 1831 il fit un voyage en Angleterre pour faire représenter à Londres son nouvel opéra féerie, intitulé Liska, ou la Sorcière de Gellenstein, et pour diriger les festivals de Dublin. De retour en Allemagne à l'automne de la même année, il y resta un an, puis entreprit avec sa famille un voyage en Italie, visita Milan, Venise, Florence, Rome, Naples, et enfin retourna à Francfort, où il reprit ses travaux. Chargé de la direction de la fête musicale d'Aix-la-Chapelle, en 1834, il s'établit dans cette ville, au mois de février. Je l'y vis pour la première fois au mois de mai, quoique nous fussions en correspondance depuis près de dix ans, et je trouvai en lui un homme aimable, modeste et d'un esprit solide. A l'occasion de cette fête, la ville d'Aix-la-Chapelle lui offrit la place de directeur de l'orchestre et de l'académie de chant : bien qu'indépendant par sa fortune, il l'accepta, dans le but unique de travailler au développement du goût et de la culture de l'art dans une ville éloignée du centre d'activité de l'Allemagne, Cependant la gêne attachée à de semblables fonctions le décida à s'en démettre en 1836, et il se rendit à Paris, puis à Londres, où il écrivit son oratorio de l'Adoration des Rois, destiné à la fête musicale d'Aix-la-Chapelle, en 1837. Se rendant en cette ville pour y préparer l'exécution de son ouvrage, il passa par Bruxelles, vint me voir et me fit entendre son oratorio avec l'amour qu'un artiste accorde toujours à ses dernières productions. Il avait de la gaieté, se portait bien, et rien ne semblait annoncer sa fin prochaine. Après le festival d'Aix-la-Chapelle, il retourna à Francfort, et se chargea de la direction de la Société de Sainte-Cécile, fondée par Schelb; mais à peine avait-il pris possession de cet emploi, qu'il mourut, le 13 janvier 1838, à l'âge de cinquante et un ans. 

Ries doit être rangé dans la classe des artistes les plus distingués de son temps. S'il n'eut pas comme pianiste un mécanisme irréprochable, il fut un des premiers qui donnèrent à cet instrument une grande puissance d'effet par des traits harmoniques de formes nouvelles, et par un fréquent usage alternatif de la pédale qui lève les étouffoirs. Dans ses compositions, son style est évidemment, sinon une imitation, au moins une émanation de celui de Beethoven, particulièrement dans ses premiers ouvrages. Vers la fin de sa vie, Ries fit des efforts pour donner à ses œuvres un caractère d'individualité, sans doute à cause des critiques qui avaient attaqué l'analogie de son style avec celui de son maître. Ses premières symphonies ont un peu de sécheresse; mais dans les autres il y a de l'éclat et de la chaleur. Il y a de fort belles choses d'un grand style dans son oratorio de l'Adoration des Rois. Sa musique de théâtre a le défaut de manquer de facilité et de charme dans la mélodie, défaut assez ordinaire chez les compositeurs qui ont écrit beaucoup d'oeuvres instrumentales. Dans la liste des ouvrages les plus importants de Ries, on remarque ceux-ci : 

[suit une liste de 28 items]

Ries a publié, avec M. Wegeler de Bonn, une notice biographique sur Beethoven, intitulée : Biographische Notizen über Ludwig van Beethoven; Coblence, Baedeker, 1838, in-8°. M. A.-F. Legentil a donné une traduction française de ce volume, sous le titre : Notices biographiques sur L. Van Beethoven par le Dr. F.-G. Wegeler et Ferdinand Ries ; Paris, Dentu, 1862, 1 vol. in-8°. Les renseignements que fournit cet ouvrage, particulièrement sur la jeunesse de l'illustre compositeur, ont sans doute de l'intérêt ; mais son caractère y est présenté sous un jour défavorable en plusieurs circonstances. Quelle que puisse être la vérité des faits rapportés à cet égard par Ries, peut-être ne devait-il pas s'en faire l'historien, et s'exposer au grave reproche d'ingratitude envers un si grand homme, qui avait eu pour lui les sentiments d'un père. Peut-être certains procédés désagréables de Beethoven envers lui, dans la dernière année de son séjour à Vienne, lui avaient-ils laissé de l'irritation : je fus porté à le croire lorsqu'il m'écrivit en 1829 une lettre remplie de félicitations à l'occasion des critiques que je publiai à cette époque sur les défauts considérables de goût qui, dans mon opinion, déparent les derniers ouvrages de cet homme de génie. Quoique je fusse persuadé alors, comme je le suis encore et le serai toujours, que j'étais dans le vrai a cet égard, j'avoue que j'éprouvai beaucoup d'étonnement de rencontrer cet écho dans l'âme du seul élève que Beethoven ait voulu former.

[NDLR : ce jugement, aussi imprudent que prétentieux, de Fétis sur les fautes de goût des dernières oeuvres de Beethoven témoigne de son conservatisme et le rend aujourd'hui quelque peu ridicule. On lira ici avec intérêt l'opinion de Berlioz sur cette question].

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