Le Thermomètre de l'Amour

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Pour quelle raison avoir intitulé chant maçonnique cette chanson parue aux environs de 1816 ? On peut se le demander en en lisant le texte ... Nous avons cependant voulu lui faire une place sur ce site : le fait que, malgré sa consternante médiocrité tant sur le plan littéraire que sur le plan maçonnique, elle ait fait l'objet d'une édition à caractère commercial, nous semble en effet donner d'utiles indications sur l'état des goûts artistiques des maçons en France à cette époque ... et/ou sur la mégalomanie bien connue de son auteur Chevallier ...

Notes

1. Le G:. M:. Chevallier, Ingénieur de S. A. R. Monsieur Frère du Roi, est le Vénérable de la Loge des Admirateurs de l'Univers

Pourquoi ici est-il désigné comme G:. M:. ? Nous ne connaissons pas d'autre signification à cette abréviation que Grand Maître, et aucune Obédience française n'a, à l'époque, de Grand Maître de ce nom. Il était cependant assez courant, au XVIIIe, de qualifier de Grand Maître le Vénérable d'une Loge. Et notre Chevallier, très soucieux de se parer de titres ronflants, n'en était sans doute pas à cela près ...

2. Monsieur, Frère du Roi, est le Comte d'Artois, futur Charles X.

3. Pascal Taskin, l'éditeur et marchand de musique, était membre de la grande famille de facteurs d'instruments dont faisait également partie le compositeur Henri-Joseph Taskin, qui avait accompagné Chevallier au piano en 1809 aux Tributaires d'Hiram. Il n'est pas précisé lequel est l'auteur de l'accompagnement de piano. C'est probablement le Pascal Taskin renseigné en 1822 comme professeur de piano à l'adresse 4, rue Faubourg Montmartre. Est-il le Taskin fils (d'Henri-Joseph), professeur de piano, qui fit partie des Frères Unis Inséparables ?

4. Voir ici sur Fasquel.

5. Nous avons trouvé cette chanson sur le site (repère FVM 182) de la bibliothèque de l'Université de Buffalo (Etat de New York, USA), que nous remercions pour l'obligeance avec laquelle elle en avait bien voulu en mettre en ligne la partition, que nous reproduisons ci-dessous.

Aux champs de Mars et de Cythère,
Joignant les myrthes aux lauriers,
L'amour par les mains de sa mère,
Couronne nos braves guerriers.
Enfant chéri de la victoire,
Le français brille tour à tour,
Au Thermomètre de la gloire,
Au Thermomètre de l'amour.

 

Malheur au jeu (de la guerre), bonheur en amour ?

Mais il nous est apparu que ce Thermomètre de l'amour n'est en fait qu'une nouvelle version d'une chanson antérieure qui, elle, était manifestement destinée - comme l'indique le premier vers - à la loge de Chevallier, les Admirateurs de l'Univers, et qui s'intitulait le Thermomètre de la gloire

Selon le Dictionnaire des protées modernes, qui en cite (p. 57) le premier couplet (le texte complet, reproduit ci-dessous, provient, p. 92, du Dictionnaire des girouettes, qui en accorde 6 à Chevallier), elle était destinée, comme tant d'autres pièces du chansonnier maçonnique, à saluer la naissance du Roi de Rome.

Le très opportuniste Chevallier, devenu un fervent partisan de la Restauration, a-t-il voulu en 1816 effacer, par la publication du Thermomètre de l'amour, le souvenir de ses enthousiasmes napoléoniens en évoquant au 4e couplet - non sans un certain culot - le passage des Français du Thermomètre de la gloire au Thermomètre de l'amour ?

                        

LE thermomètre DE LA GLOIRE.

 CHANSON.

 

 Admirateurs de l'univers, 
L'esprit pindarique m'inspire :
Formons d'harmonieux concerts, 
Chantons un héros sur la lyre ! 
L'Empereur, cueillant à son gré 
Tous les lauriers de la victoire, 
Elève, à son plus haut degré,
Le thermomètre de la gloire.

 

D'Hymen allumant les flambeaux,
Le Ciel comble notre espérance,
Et fit trembler ces fiers rivaux,
Ligués en vain contre la France.
Les noms de leurs BOUILLaNS héros,
Bannis du temple de Mémoire,
Tombent au plus bas des zéros
Du thermomètre de la gloire.

 

 De vos exploits, de vos vertus,
Romains, les siècles vont renaître ;
Relevez vos fronts abattus :
Le fils de Mars est votre maître.
Renouvelant de point en point
Les prodiges de votre histoire,
Il ira jusqu’où ne va point
Le thermomètre de la gloire.

 

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