Cérémonie funèbre à Lille en 1844 

On peut lire dans la revue l'Orient (p. 55) ce compte-rendu d'une Tenue organisée le 5 septembre 1844 par la loge lilloise des Amis Réunis, et qui comprenait notamment une cérémonie funèbre : 

Dans le but d'honorer, par une cérémonie funèbre, la mémoire de plusieurs membres de la loge, décédés dans le cours de l'année, et qui s'étaient distingués par leur talent, leur zèle et les plus hautes qualités du cœur, dans le but aussi de récompenser des artisans dévoués, des citoyens intrépides, toujours prêts à sacrifier leur vie pour sauver celle de leurs semblables, la loge des Amis-Réunis avait organisé, jeudi dernier (5 septembre), une fête à laquelle elle avait convié un assez grand nombre de dames et quelques personnes non initiées.

Le temple, tendu de noir, éclairé de lampes sépulcrales, offrait un spectacle imposant. La cérémonie, fort bien ordonnée, était présidée par le frère Vandalle, vénérable, qui fit entendre des paroles pleines d'onction et de convenance. L'orateur prononça ensuite l'oraison funèbre des défunts, et retraça avec éloquence les titres signalés qu'ils avaient à l'amour et à l'estime de leurs frères. Dans le cours de la cérémonie, fut exécuté un chant analogue à la circonstance, dont la musique avait été composée par notre compatriote, le frère Choulet, qui réside actuellement à Douai ... 

L'assemblée se transporta ensuite dans un autre local pour la distribution des prix de vertu. Le vénérable adressa de touchantes allocutions aux lauréats dont l'orateur venait de raconter la vie si honorable et si digne.

Le texte du cantique est parfaitement dans le style du temps, tant sur le plan de la forme que sur celui du fond, exprimant une religiosité en parfait accord avec la croyance en Dieu et en l'immortalité de l'âme (croyance dont l'obligation allait être introduite dans la Constitution du Grand Orient en 1849).

O vous qui maintenant rayonnez dans le ciel,
Sur vos frères jetez un regard tutélaire !
Priez avec ferveur l'Architecte éternel
Que toujours sa bonté nous guide et nous éclaire.
Faites que nos accents, au céleste séjour,
S'unissent au concert célébré par les anges
Et chantent avec eux le tribut des louanges
Qu'on doit au Dieu de paix, de bonheur et d'amour.
Vos vertus ont enfin trouvé leur récompense ;
lci-bas nous restons pour vivre et pour souffrir ;
O frères ! priez Dieu pour que dans sa clémence
Saintement comme vous il nous laisse mourir !

La revue l'Orient

L'Orient, revue universelle de la Franc-Maçonnerie, rédigé par les sommités de la littérature française et étrangère (sic), sous la direction du Frère F.-T. B.-Clavel, est une revue éphémère ayant paru à Paris en 1844 et 1845.

Dès son premier numéro, elle s'attachait à défendre la Clémente Amitié - dont le Vénérable était précisément le même François-Timoléon Bègue-Clavel, 1798-1852 - contre des accusations d'agitation politique. 

Ayant d'emblée affirmé son indépendance d'esprit vis-à-vis du Grand Orient (qui appréciait peu la liberté de la presse maçonnique), elle devint la cible de celui-ci, qui la mit aussitôt à l'index avec d'autant plus d'empressement qu'il était déjà en conflit avec Clavel à propos de son Histoire pittoresque.

Dans la déclaration d'intentions intitulée But et plan de ce journal figurant à son premier numéro, on pouvait lire :

Il existe sur la surface du globe plus de trois mille loges maçonniques, dont les membres, pénétrés des mêmes principes, mus par la même pensée, liés par le même serment, se reconnaissant entre eux à l'aide des mêmes signes, se proposent tous également pour but de propager dans le monde les bienfaits de l'instruction, de la moralité, de la charité, de la paix et du dévoûment fraternel. D'où vient cependant que cette association si nombreuse et si étendue, si forte par sa composition, animée de si généreux sentiments et capable d'opérer tant d'œuvres grandes et utiles, semble s'ignorer elle-même et soit en quelque sorte réduite à l'impuissance ? C'est que la constitution qui la régit renferme, à côté d'institutions pleines de sagesse et qui pourraient être fécondes en excellents résultats, des imperfections et des vices qui la frappent d'une stérilité presque absolue ; c'est que ses loges sont abandonnées tout entières à leur action isolée ou capricieuse ; c'est qu'aucun mode constant et régulier de communications ne les relie entre elles, ne permet à la pensée individuelle de rayonner de l'une à l'autre, n'établit entre celles-ci et celles-là une vertueuse émulation pour le bien, et n'apporte aux entreprises de chacune l'appui et le concours des efforts de toutes.

C'est dans la vue d'améliorer, sinon de faire cesser complètement ce regrettable état de choses, que nous avons fondé la revue qui paraît aujourd'hui. 

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