Couplet adressé aux Dames par Fleury

Cliquez ici pour entendre un fichier MP3 de la partition 516 de la Clé du Caveau

Dans Les Folies (1761) de Fleury, on trouve (pp. 321-7), dans la série des chansons nouvelles ou qui, n'ayant été ni gravées ni imprimées, doivent être moins connues, une suite de couplets se répondant sur le thème Les Francs-Maçons.

Au départ d'un très classique avis adressé aux dames pour justifier leur exclusion des Loges, se développe un marivaudage, dont le caractère est de plus en plus privé, entre l'auteur et l'une de ces dames.

On notera la comparaison - peu courante - entre les réunions maçonniques et les fêtes de Minerve.

L'Amour aujourd'hui tout en larmes est un poème de Vergier, dont nous n'avons pas rencontré de partition.

Robin turelure est une chanson (il existe sous ce titre une partition de Corrette) qui, au vu de ses multiples utilisations à l'époque, doit avoir eu un certain succès et que la Clé du Caveau donne sous le n° 516. On en trouvait déjà (n° 47) une partition (pas identique) en 1737.
 


   

 LES FRANCS-MAçONS.

Couplet adressé aux Dames,

Sur l'air. L'Amour aujourd'hui tout en larmes. 

BEautés, de qui l'oeil nous observe,
Et cherche à nous rendre indiscrets,
Quoique nos coeurs soient à vous sans réserve,
Comme l'Amour, l'honneur a ses secrets ;
Songez qu'aux fêtes de Minerve,
Vénus ne se trouva jamais.

 

R É P O N S E

Par une Dame Anonyme.

C'Est pour rire qu'on vous observe,
Et non pour vous rendre indiscrets ;
On sçait assez, malgré votre réserve,
Que les enfans ont de petits secrets,
Et que ni Vénus ni Minerve ;
A leurs jeux n'assistent jamais.

Ce couplet fut suivi de plusieurs autres dans l'un desquels
l'Anonyme faisait espérer le prix le plus flateur, à celui qui
lui découvriroit les secrets du Maçonisme.

 

R É P O N S E de l'Auteur.

Air. Robin turelure lure.

DIvinités de nos coeurs,
Ce serait vous faire injure,
De croire que vos faveurs,
                  Turelure,
Fussent le prix d'un parjure,
Robin turelure lure.

L'offrande que les mortels
Dirigés par la nature,
Consacrent sur vos autels,
                    Turelure,
Ne sçauroit être trop pure,
Robin turelure lure.

De mes sentimens pour vous,
J'ébauche ici la peinture,
Le reste doit entre nous,
                      Turelure,
S'expliquer sous la serrure,
Robin turelure lure.

 

 

 

Comme il s'agit d'un débat assez oiseux, sur le ton d'un marivaudage de salon, nous n'en avons reproduit ici que le début ; la suite est un badinage quelque peu leste, mais qui ne concerne plus guère la maçonnerie ; de toute manière, si vous voulez la lire, elle est ici. Au passage, l'auteur y fait allusion à une petite pièce qu'il a écrite (mais dont nous n'avons pas trouvé de trace) sous le titre d'explication courte et familière des véritables secrets des Francs-Maçons.

 

Un secret bien verrouillé ?

C'est un thème classique dans la littérature maçonnique du XVIIIe que le déploiement de séductions féminines en vue de capturer le fameux secret des Francs-maçons, censé exciter toutes les curiosités - et surtout les féminines. On le trouve par exemple dans Les Fra-Maçonnes de Poinsinet ou dans Les Fri-Maçons de Clément.

Il faut bien dire que la première divulgation française résultait précisément des confidences sur l'oreiller recueillies par la Carton

C'est manifestement le même stratagème que se propose d'utiliser la Dame Anonyme du dialogue de Fleury en faisant espérer le prix le plus flatteur à celui qui lui découvrirait le secret. Mais l'Auteur, tout en excluant ce parjure et en condamnant cet indigne procédé, entend bien poursuivre son flirt pour le mener à bien sous la serrure, ce qu'il laissera entendre assez crûment.

 

Cette serrure ne fait-elle pas penser au Verrou de Fragonard ?

 ci-contre : Le verrou par Par Jean-Honoré Fragonard — The Yorck Project: 10.000 Meisterwerke der Malerei. DVD-ROM, 2002. ISBN 3936122202. Distributed by DIRECTMEDIA Publishing GmbH., Domaine public

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