Invocation au Grand Architecte (Bruxelles, 1798)

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L'inauguration du nouveau Temple, consacré au souverain de la nature, de la Loge bruxelloise des Amis Philanthropes a eu lieu le 1er décembre 1798 et son Tracé a été publié.

A l'occasion du 3e anniversaire de cet événement, Legret, à ce moment Orateur, prononça un discours, qui a été reproduit par lui aux pp. 10-15 de son Troubadour franc-maçon et 155-62 de Mon portefeuille.

Il y donne quelques détails qui ne figurent pas au Tracé ci-dessus, et ce récit (partiellement reproduit ci-dessous) est particulièrement indicatif quant au ton pompeusement solennel des cérémonies de l'époque ; il y cite notamment (p. 157) les 4 vers ci-dessous, chantés par l'Orateur en guise d'invocation au Grand Architecte.

Il évoque notamment ainsi la recherche du feu sacré par le Vénérable (qui le fit jaillir du choc du fer et de la pierre ignée et qui sera ensuite qualifié de Prométhée qui transporté dans l'Olympe en a ravi le feu sacré) :

Ce fut, il y a trois ans et à pareil jour, que nous nous trouvâmes ainsi réunis dans ce même parvis ; ce fut là que commencèrent ces travaux d'inauguration, dont nous célébrons aujourd'hui l'anniversaire ; enfin, ce fut ici que, pour la première fois, la lumière maçonnique brilla et dissipa les ténèbres profanes qui nous environnoient.

Pendant que notre Vénérable, assisté de nos plus sages Frères, s'occupoit à la recherche du feu sacré, l'Orateur adressoit au Grand Architecte une invocation à laquelle nous nous unissions tous dans le recueillement, pour dire avec lui :

Air: Triste raison.

Nous t'invoquons, souverain Architecte,
Accorde-nous un rayon de tes feux :
Plus ta lumière éclaire notre secte,
Moins sur la terre il est de malheureux

Cette invocation fut à peine finie, que nous aperçûmes qu'elle étoit déjà exaucée ; car à travers les ténèbres, nous vîmes notre Vénérable revenir vers nous, tenant à sa main une étoile (ndlr : i. e. un cierge) vierge, à laquelle il avoit communiqué le feu sacré.

Vous concevez, Mes Frères, la joie qui s'empara de nos coeurs : elle passoit dans nos yeux, elle y brilloit à mesure que cette précieuse étoile communiquoit ses feux du nord au midi, et de l'orient à l'occident. Le Frère Orateur, digne organe de l'assemblée, la salua à peu près en ces termes :

Je te salue, étoile virginale,
Des vrais maçons tu dois être l'amour ;
Deviens pour eux l'aurore matinale
Qui leur promet et devance un beau jour.

Les Frères de l'harmonie lui succédèrent, et firent entendre les plus brillants concerts.

On remarque que, pour faire la rime avec le Grand Architecte, la maçonnerie s'autodésigne ici par le mot secte, mot qui depuis lors est devenu nettement péjoratif.

Il est frappant aussi de voir à quel point, dans les textes de la cérémonie, la religiosité du Grand Architecte (souvent désigné comme le Grand Etre ou l'Etre Suprême) garde, quatre ans après la chute de Robespierre, une expression influencée par le culte de l'Etre Suprême.

A propos de l'air Triste raison.

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