La boussole de la Nature et de la Vertu

Philipp Friederich Steinheil, membre de la prestigieuse Loge francfortoise Zur Einigkeit (L'Union), a publié en Allemagne en 1746 Le franc-maçon dans la république ou réflexions apologiques sur les persécutions des francs-maçons, texte qu'il a dédicacé à Henry, Comte de Brühl (qui était un maçon de la Stricte Observance Templière). Après avoir rappelé les persécutions antimaçonniques aux Pays-Bas en 1735, en France en 1737, à Vienne et à Rome, l'auteur développe plus spécialement l'interdiction récemment (1743) promulguée à Berne et le (classique) argumentaire expliquant à quel point ces condamnations basées sur l'ignorance étaient dépourvues de justification. Vient ensuite une apologie de la Maçonnerie et de son utilité pour les chefs d'Etat clairvoyants : quelques exemples sont cités, dont Berlin. L'inhumanité de l'Inquisition est aussi dénoncée.

Le texte comprend de nombreuses citations, dont certaines (1, 2, 3) peuvent être identifiées avec certitude comme des extraits de chansons maçonniques.

Par contre, nous ne connaissions pas le texte ci-dessous, qui est cité aux pp. 29-30, et ne pourrions donc garantir que, comme dans les cas précédents, il s'agisse d'une chanson plutôt que d'un poème.

Il nous a en tout état de cause semblé suffisamment intéressant pour être publié ici.

 

O glorieuse Architecture ! qui ne laisse aucun de ceux, qui s'attachent à toi, sans recompense. O Societé charmante ! II n'y a point de veritable Liberté, qu'à ta suite, & point de véritable Paix que sous tes Etendards. Car

Tandis que d'une aile legere
Les agrémens & les ris
Volent dans nos lieux solitaires,
Pour en bannir tous les soucis,
Aux yeux de la délicatesse,
Parmi les jeux les plus charmans,
Nous faisons boire la sagesse
Dans la coupe enchanteresse
De plus doux amusemens.
Maintenant que le Vulgaire
Ignorant ces glorieux traits
Ose insulter au Mystere
De nos respectables Secrets,
Qu'ils sachent, que la grandeur d'âme,
Et la vertu qui les en bannit,

Filerent toujours la trame 
Du lien qui Nous reunit.
C'est ainsi que dans tous les ages
Par les charmes les plus doux 
La raison a parmi Nous 
Cultivé ses plus vrais sages ;
Et d'une douce Philosophie 
Engayant ses tendres leçons 
A versé le bonheur de la vie 
Sur ses plus fsages nourrissons.
 Caton chéri, charmant Socrates,
Qui par le bien marquez vos dates,
Et qui toujours à l'Unisson 
Du plus beau de tous les âges 
Nous ramenant la saison, 
Dans lé bras des Ris volages 
Faites folâtrer la Raison. 
Vrai Licée, agréable Ecole, 
Où pour fixer le tems frivole 
Et sur cet Empire d'Eole
Etre des vents moins combattu 
Nous n'avons d'autre Boussole,
Que la Nature & la Vertu.

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