Cantique d'Installation
de la Loge de la Réconciliation (Bouillon 1841)

 

La ville de Bouillon, en Ardenne belge, est célèbre dans l'histoire de la maçonnerie pour avoir été, au XVIIIe, le siège du Grand Orient de Bouillon, qui aurait, selon Ligou dans son Dictionnaire de la Franc-maçonnerie (PUF), joué un rôle important dans l'élaboration des Hauts Grades Ecossais.

 

Grand Orient de Bouillon

Un ouvrage d'André Kervella, Francs-maçons au duché de Bouillon (éd. Weyrich), évoque cette histoire.

Ragon pour sa part en écrit ceci à la p. 118 de son Orthodoxie maçonnique :

Ce corps maçonnique, qui n'existait plus en 1774, a fondé plusieurs loges en France. Il avait son siège à Bouillon, ville des Pays-Bas, et pour grand-maître le duc de Bouillon, son fondateur, sous le titre de Protecteur. Il comptait parmi ses membres beaucoup de personnes de distinction : on y remarquait le prince de Rohan, le prince de Guéménée, le duc de Montbazon et autres que le duc de Bouillon y avait introduits.

On lisait autour du sceau de ce G.-O. : Godfredus, Dei gratiâ, dux Bulloniensis, protector.

Cette puissance éphémère délivrait ses constitutions et ses capitulaires au nom de la métropole d'Edimbourg (Grande-Loge royale), ce qui fait présumer que sa doctrine et ses grades avaient de l'analogie avec ceux du régime, dit écossais, d'alors.

La Loge Saint-Charles de la Parfaite Harmonie en était membre, mais elle disparut à la fin du siècle (une Loge de la Grande Loge Régulière de Belgique a récemment récupéré ce titre distinctif ; son site web, où elle recopiait la présente page sans même avoir l'élégance de citer sa source, a disparu après une existence éphémère). 

Lui succéda, cinquante ans plus tard, la Loge de la Réconciliation, qui fut installée le 11 septembre 1841 par le Grand Orient de Belgique, représenté par Defrenne.

Après la cérémonie, celui-ci prononça, non plus ès-qualité, mais à titre personnel, un discours (où il évoque le fait que, en 1794, il fut arrêté à Sedan - ville proche de Bouillon - et n'échappa que de justesse à la guillotine) et chanta un cantique de sa plume, pour la musique duquel il s'était, comme en une autre occasion, assuré la collaboration du Frère Zerezo.

Ces deux pièces ont été, la même année, rassemblées dans une brochure imprimée à Bruxelles.

La partition de Zerezo ne semble pas avoir été conservée. Cependant, la métrique étant semblable (couplets de 8 vers décasyllabes), on pourrait très facilement chanter le texte ci-dessous sur l'air que le même Zerezo avait fait pour un autre texte de Defrenne, Les FrancsMaçons et le Clergé Belge, air que vous pouvez entendre en cliquant ici).

 

La Loge de la Réconciliation eut une existence éphémère puisqu'elle ne resta active que pendant 6 ans. 

Il fallut attendre un siècle pour voir se créer à Bouillon, d'abord, en 1948, un cercle fraternel, Le Sanglier, ensuite, en 1965, la Loge Iris du Grand Orient de Belgique.

Comme très souvent chez Defrenne, la seconde partie du 4e couplet fait évidemment allusion à l'agression des évêques belges contre la maçonnerie.

Vieille Brune ???

Quelle est la Vieille Brune évoquée au dernier couplet ? S'agirait-il d'une célèbre bière belge ?

Ou alors faut-il y voir une allusion à un système maçonnique resté très mystérieux, originaire de Toulouse (et dont il semble impossible de retrouver un cantique pourtant célèbre à l'époque) ?

Dans l'ouvrage cité plus haut, Ragon  en écrit ceci (p. 122) :

RITE DE LA VIEILLE-BRU, OU DES ÉCOSSAIS FIDÈLES. (1748.)

En 1748, une année après la création du chapitre jacobite d'Arras, par Charles-Édouard Stuart, le rite de la Vieille-Bru ou des Écossais fidèles fut établi à Toulouse, en témoignage de reconnaissance envers les maçons de cet Orient, qui, dit la Chronique, avaient favorablement accueilli sir Samuel Lockard, aide-de-camp du Prétendant, pendant son passage en cette ville.

Ce rite, composé de neuf degrés, était divisé en trois chapitres, qui prenaient le nom de consistoire.

Le premier chapitre comprend Apprenti, Compagnon, Maître, Maître secret.

Le deuxième comprend quatre degrés, désignés sous le titre d'Elus. Son système est templier.

Le troisième chapitre était formé des initiés aux secrets de la Maçonnerie scientifique. Ce régime était administré par un conseil, dont les membres avaient nom Ménatzchims, ou chefs suprêmes du rite.

Le G.-O. ne lui reconnaissant pas un but moral ou scientifique assez précis, refusa, en 1804, d'admettre ce rite, que le titre ne favorisait pas. On a aussi prétendu que la charte du roi d'Angleterre était loin d'offrir les caractères de l'authenticité. Il continua, dit-on, à être pratiqué dans le midi de la France jusqu'en 1812, qui fut, sans doute, son année fatale, car le 8 février le directoire des rites rejeta de nouveau la demande en reconnaissance de ce régime formée par la loge Napoléomagne, à Toulouse, et ce refus est basé sur les mêmes motifs.

On trouve un texte très voisin de celui de Ragon à la p. 446 de l'ouvrage de Kauffmann et Cherpin (Lyon, 1850), Histoire philosophique de la franc-maçonnerie.

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