L'Internationale des Francs-Maçons

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Nous ignorons la date de cette chanson écrite, sur un air ... très connu, par le Frère Noël de la Loge lyonnaise (à la Croix-Rousse) la Bienfaisance-Amitié. Elle doit dater de la toute fin du XIXe ou du début du XXe, et nous l'avons arbitrairement rangée dans ce dernier chapitre. 

l'Internationale des Francs-Maçons

Dédiée à tous les Francs-Maçons de France par le Frère NOEL

 de la BIENFAISANCE-AMITIE

1.

C’est dans les Loges maçonniques 
Où naît la Cordialité, 
C’est là que l’on met en pratique 
Les liens de la Fraternité.
Tous les maçons sont les apôtres 
Des lois par nos loges adoptées. 
C’est de s’aimer les uns les autres, 
C’est la vraie Solidarité.

Refrain

Pour le progrès social, 
Francs-Maçons, groupons-nous. 
Voilà notre idéal : 
Tous pour un, un pour tous.

2. 

Pour être maçon, la morale 
Est de suivre le droit chemin, 
Faut être international 
En aimant tout le genre humain. 
L’on naît tous égaux sur la terre. 
S’il combat pour la Liberté, 
Tout homme pour nous est un frère, 
Frère de Solidarité.

3.

Le but des Enfants de la Truelle 
Est d’affranchir l’Humanité, 
De tyrans et de la tutelle 
Des rois et de la papauté. 
Les bienfaits de la République, 
Aux travailleurs sont apportés, 
Grâce à nos écoles laïques, 
Classe de Solidarité. 

4.

Science et progrès pacifique, 
La libre Pensée, la Raison, 
Voilà les règles maçonniques, 
Et, pour les suivre, compagnon, 
Li[t]s, étudie, réfléchi[t]s, pense.
Soi[t]s bon, aide à la pauvreté 
C’est la règle de conscience, 
Règle de Solidarité.

5.

Pour nous Maçons, point de frontières, 
Voyez sur les deux continents, 
D’un pôle à l’autre de la terre 
Nos étendards flottent au vent. 
Fût-il une mission plus belle 
Pour nous, les peuples vont voter 
La République Universelle, 
Œuvre de Solidarité.

L'INTERNATIONALE

L'Internationale est l'oeuvre d'Eugène Pottier (1816-1887) pour les paroles (1871) et de Pierre De Geyter (1848-1932) pour la musique (1887).

On sait (voir ci-dessous) que Pottier fut maçon (initié en 1875 à la Loge newyorkaise les Egalitaires réunissant des proscrits de la Commune, il s'apprêtait, après son retour en France, à s'affilier en 1887 à la Loge parisienne Le Libre Examen, quand la mort interrompit ce projet. Le Libre Examen était la Loge de Thirifocq, le promoteur de la plantation des bannières maçonniques sur les remparts lors de la Commune). Celui-ci (qui, très curieusement, présente la chose comme une demande d'initiation et non d'affiliation, comme si l'épisode newyorkais avait été oublié ou non pris en considération : encore aujourd'hui, certains considèrent d'ailleurs les Egalitaires comme une loge sauvage) a raconté (cfr les pp. 116-8 de l'ouvrage d'Ernest Museux, Eugène Pottier et son oeuvre) son interrogatoire par la Loge, préalable à cette cérémonie projetée.

Aucun élément ne nous permet de supposer que De Geyter par contre ait été maçon.


De Geyter


Pottier

Il y a une autre Internationale maçonnique sur ce site.

Pottier maçon

L'édition - à caractère ouvertement maçonnique (le nom de Pottier sur la couverture est même suivi des trois points) - des Chants révolutionnaires de Pottier par le Comité Pottier (avec une préface signée entre autres par Jaurès et une présentation par Goupil) contient les lettres ci-dessous d'Elie May et de Pottier.

La lettre de candidature de Pottier à la Loge Les Egalitaires

New York, 2 décembre 1875. 

Citoyens,

Je demande à participer aux travaux de la maçonnerie et à être admis dans votre loge. 

Je sais qu'elle est composée d'un groupe de libres penseurs qui, ayant fait table rase des traditions et ne reconnaissant rien de supérieur à la Raison humaine, emploient consciencieusement la leur à la recherche de la Vérité et de la Justice.

Je crois comme vous que le bonheur de I'Humanité ne peut avoir d'autres bases. La Science, dégagée de toute entrave dogmatique, marche de jour en jour à la découverte des lois de notre nature et prépare ainsi le code social ; l'Humanité, pour entrer dans sa voie normale, doit se créer à notre propre image, c'est-à-dire devenir comme l'homme, une et multiple : une par l'action, multiple par les organes. 

Cette transformation de l'universel conflit en Harmonie universelle, ne peut s'opérer que dans une phase d'égalité réelle ; non pas d'égalité mensongère de droits, mais égalité de lumière et de bien être. 

Ces quelques mots me serviront de profession de foi, et je crois que ma vie en prouve la sincérité.

Je suis né à Paris, le 4 octobre 1816, d'une mère dévote et d'un père bonapartiste. A l'école des frères jusqu'à dix ans et à I'école primaire jusqu'à douze, - c'est à mes lectures de jeune homme que je dois d'être sorti de cette double ornière sans m'y embourber.

En 1832 j'étais républicain, en 1840 socialiste. J'ai pris une part obscure aux révolutions de 1848 : février et juin. Du coup d'État au 4 septembre je demeurai intransigeant : pactiser avec les assassins du Droit, c'est se prostituer. Après plus de trente ans de prolétariat, je m'établis dessinateur en 1864. Les dessinateurs industriels n'avaient pas alors de chambre syndicale. A mon instigation, ils en fondèrent une qui comptait cinq cents membres avant la guerre et qui adhéra en bloc à la fédération de l'Internationale.

C'est à ma coopération à ce mouvement que je dus d'être élu membre de la Commune dans le IIe arrondissement. Jusqu'au 28 mai j'y exerçai les fonctions de maire. Après la prise de la mairie par les Versaillais, je me repliais sur le XIe arrondissement. 

J'avais accepté sans réserve le programme de la Révolution du 18 mars : 

Autonomie de la Commune. 

Émancipation du travailleur.

Je crois, dans toute cette période, avoir accompli mon devoir. Dans la lutte où tous les citoyens dévoués ont perdu leur vie ou leur liberté, je m'estime favorisé de n'avoir perdu que ma fortune. J'ai passé deux ans d'exil à Londres et deux ans à Boston, tâchant d'honorer par le travail ma pauvreté et la proscription. 

C’est à Paris, dans les derniers jours de la lutte, quand j'ai vu, au milieu des transports d'enthousiasme, le spectacle grandiose de la maçonnerie adhérant à la Commune et plantant ses bannières sur nos murailles éventrées d'obus ; c'est alors que je me suis juré d'être un jour un des compagnons de cette phalange laborieuse.

Je me présente à son chantier.

Embauchez-moi ! 

Eugène Pottier 

238, East 30th Street. 

A voir sur une autre page de ce site : Pottier et la Commune de Paris.

On peut lire aussi les pages (179-181 et 218-229) consacrées à Pottier par Henri Avenel dans son ouvrage Chansons et chansonniers.

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