Chanson Occitane

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Cette chanson (pp. 71-74 du Code récréatif) est également reproduite (pp. 120-122) par Ligou, dans Chansons maçonniques des 18e et 19e siècles (ABI éd.).

Ligou précise que c'est le seul chant Maçonnique "dialectal" qu'il ait rencontré, que la graphie en est antérieure à la réforme félibréenne des langues occitanes, et que le dialecte employé paraît être toulousain, avec quelques tournures gasconnes.

L'air donné par le Code récréatif est celui (que nous n'avons pu identifier) de Aux colonnes d'Hercule. La partition donnée par Ligou est cependant celle de D'une certaine façon, et c'est celle que vous entendez.

 

INBITATIEOU A UN FRERO D'AL PAYS,
 NOUBELLAMENT RECACHUT FRAMACOU
 D'ANA BISITA LA LOCHO D'ADOPTIOU.
 
COUPLETS MACOUNIQUOS LANGUEDOCIENS

Anas, anas, moun fréro
En locho d'adouptieou .
Chamai, n'aurés sus terro 
Tant de satisfactieou. 
Beyrés de soeurs fidélos, 
Tant doucos e tant bellos, 
Qué toutes lous maçous, 
En chittant uno oeillado 
Sus a quello assemblado, 
Son coumo de tisous.

De poulido proufano 
Beyrés la réceptieou; 
Beyrés, oui beyrés qu'ano 
Séro soun émontieou. 
Quand sa bello bouquetto 
Mourdis à la poumetto, 
Un gros et loung serpen
(1) 
Sourtis dechout l'herbetto, 
Et din sa car moufletto, 
Bol enfounça sa den.

La pichoto, pécaire, 
Crido, sébanouis,
Ai moundieou qu'ané affaire ! 
Bité chaquun couris. 
Per sauba tant dé charmes, 
L'un, soun aigo das carmes 
Tiro dé soun gousset, 
Et l'autre, sans ré dire; 
Per qué millou respire, 
Desarro soun courset.

La proufano, desuito 
Oubris sous yéols charmans; 
Mais né bey a sa suito, 
Que diablés fulminans. 
N'ai pas pus peou, s'escrido; 
Démouns, sieou intrepido; 
Tout bostré tems se per. 
Qu'aquel mot bons suffise, 
Bous séguirai, bous dise 
Jusqu'al found dé l'enfer.

Tout chango et nostro bello 
Se trobo en Paradis. 
L'hurouso joubancello 
Que tendramen souris, 
Dins un poulit parterro, 
S'asséto près d'un frero, 
Bestit en capouchin,
(3) 
Que baiso sa bouquetto, 
Et met din sa manetto 
Las flous dé soun jardin.

Moun frero abes hits coumo 
Bostro noubello soeur 
O mourdit à la poumo 
Et chouit d'al bonheur. 
Fillo es d'abord timido; 
Mai quand es aguérido, 
Aco touchour beyrés,
Coumo un demoun riposto.
L'ou premier pas soul costo, 
Lou risto n'és parés.

INVITATION A UN FRÈRE DU PAYS,
NOUVELLEMENT REÇU FRANC-MAÇON
A VENIR VISITER LA LOGE D'ADOPTION.
COUPLETS MAÇONNIQUES LANGUEDOCIENS 

Venez, venez mon frère, 
En loge d'adoption. 
Jamais n'aurez sur terre 
Tant de satisfaction. 
Verrez des soeurs fidèles, 
Si douces et si belles 
Tant que tous les Maçons 
En jetant une oeillade 
Sur une telle assemblée 
Sont comme des tisons. 

D'une jolie profane 
Voici la réception; 
Voyez, oui voyez comme 
Sera son émotion 
Quand de sa belle bouche 
Elle mordra à la pomme. 
Un gros et long serpent 
Sort de dessous l'herbette 
Et dans sa tendre chair 
Veut enfoncer sa dent. 

La petite, peuchère, 
Crie et s'évanouit,
Ah Mon Dieu quelle affaire! 
Vite chacun accourt 
Pour sauver tant de charmes. 
L'un, de son gousset tire 
Son eau de vie des Carmes 
Et l'autre sans rien dire 
Pour que mieux elle respire 
Desserre son corsage. 

La profane, aussitôt, 
Ouvre ses yeux charmants 
Mais elle ne voit tantôt 
Qu'un diable fulminant. 
Pas de peur, s'ecrie-t-il, 
Au moins soyez intrépide.
(2)
Ne perdez pas de temps. 
Que ce mot vous suffise 
Je vous suivrais, vous dis-je 
Jusqu'au fond de l'enfer. 

Tout change et notre belle 
Se trouve en Paradis. 
L'heureuse jouvencelle 
Qui tendrement sourit 
Dans un joli parterre 
S'assied auprès d'un frère 
Vêtu en capucin 
Qui sa bouche bécote 
Et met dans sa menotte 
Les fleurs de son jardin. 

Mon frère, oui voilà comme 
Votre nouvelle soeur 
A mordu à la pomme 
Et ce fut le bonheur. 
Une fille est timide d'abord 
Mais quand elle s'enhardit 
Voyez, presque toujours 
Comment l'esprit paraît. 
Le premier pas seul coûte, 
Et le reste n'est rien. 

(1) Le rituel des Loges d'Adoption, au Grade d'Apprentie, rappelait le jardin d'Eden et le thème de la Chute.

(2) Ou bien (il y a sans doute un jeu de mots entre demouns qui veut dire du moins ou au moins et demoun, esprit - pas forcément mauvais) :
N'ayez pas peur, s'écrie 
L'esprit, soyez intrépide. 

(3) Allusion sans doute à une autre chanson, le Frère Timoléon (figurant également au recueil de Ligou), racontant comment, au cours d'une cérémonie d'Adoption, l'Orateur s'est déguisé en capucin pour confesser la jeune fille qu'il aime en secret.

(traduction aimablement réalisée par Maxime F.)

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