Solstice d'Eté à la Triple Unité en 1810

   Cliquez ici (midi) ou ici (MP3)  pour entendre l'air

Ces couplets font partie de ceux qui furent chantés au cours du banquet qui a suivi les Fêtes de l'Ordre et du Vénérable ad vitam (le Frère Defondeviolle), célébrées le dix-neuf juin 1810 à la Loge écossaise (parisienne) de la Triple Unité à l'occasion de la Saint-Jean d'Été.

Ils figurent aux pp. 53-5 du Tracé de ces Travaux où ils sont introduits par le texte suivant :

Le frère Druet-Després, Orateur adjoint, saisit cette occasion [ndlr : la troisième Santé, portée au Vénérable par le Vénérable d'honneur] pour payer son tribut d'amitié au Vénérable par les couplets suivants, de sa composition

Voir ici sur l'air Tenez, moi, je suis un bon homme.

Comme il est déjà signalé à propos d'une autre chanson de ce site, être de la Saint-Jean est une expression, perdue de nos jours, qui signifie ne pas être à la hauteur. L'auteur fait donc preuve de (fausse) modestie en laissant entendre (à l'avant-dernier couplet) que sa seule compétence (la seule activité qu'il cite où il ne soit pas de la Saint-Jean) est d'aligner des barriques.

Fausse modestie ou feinte humilité ?

A l'époque, proclamer ostentatoirement l'aveu de son incapacité semble bien, pour un Orateur en Loge, faire partie intégrante du maçonniquement correct.

En voici quelques exemples :

En acceptant les fonctions d'Orateur, si peu proportionnées à mes moyens, fonctions qui, par leur application présente, ne prouvent qu'un excès de bonté toute fraternelle, que je dois considérer plutôt comme un nouvel encouragement qu'une récompense méritée, j'ai dû me conformer à votre décision, en Maçon zélé, avec la conscience de ma faiblesse. (source)

Vous avez daigné me confier l'usage de la parole ; je sens, mes Frères, toute l'étendue de cette faveur ; je sens toute l'immensité des devoirs qu'elle m'impose, et je vous fais avec vérité l'aveu de mon insuffisance. (source)

Si je n'avais consulté que mes forces, j'aurais sans doute refusé de prendre la parole dans une solennité qui a été précédée de tant d'événemens funestes à la Maçonnerie ... Mais si la faiblesse de mes talens devait m'interdire de remplacer aujourd'hui l'Orateur qui devait monter à cette tribune, un sentiment plus fort que l'amour-propre a dû m'inspirer le courage de parler ... Plein de zèle pour notre sainte loi, l'énergie suppléera, chez moi, à la faiblesse du talent ... (source : discours du Frère Langlacé à la Fête de l'Ordre 1822).

Il y a quelque témérité à élever la voix dans cette enceinte, où des talens supérieurs se sont fait remarquer de tant de manières différentes ; mais il vous sera facile de voir que ce n'est pas pour entrer en lice, que je me présente à la tribune. Je ne cherche point des palmes que je ne pourrais atteindre ; le seul désir d'être utile à la Maçonnerie, m'encourage à parler ... (source)

... plus la tâche qui m'est imposée me paraît agréable et flatteuse, plus je gémis sur mon insuffisance, lorsqu'il s'agit de vous bien exprimer tous les sentiments que j'éprouve. (source)

... vous vous apercevez , sans doute, de mon peu de talens oratoires, trop jeune Maçon encore pour remplir la place d'orateur avec dignité, j'avais prié mes Frères de ne pas m'investir de cette honorable fonction, n'ayant pas d'érudition, ni assez de moyens pour justifier leur choix ; cependant, comme la première vertu d'un Maçon est l'obéissance, je n'ai plus osé persister dans le refus d'un ministère aussi important ... (source)

Appelé à vous exposer l'objet, les maximes, les loix & les devoirs de l'état que vous venez d'embrasser, je sens combien cette tâche est au-dessus de mes forces & des bornes prescrites à ce Discours. Le zèle qui m'anime ne peut s'y refuser ; mats il me donne quelques droits à votre indulgence ... (source)

... que peut ajouter ma faible voix aux sentiments qui pénètrent vos cœurs ? Pourquoi faut-il qu'à peine admis parmi vous à des fonctions au-dessus de mes forces, je doive, en ce moment solennel, faire imparfaitement ce que tant d'autres feraient si bien ? Je ne conçois pas même l'espérance que les  regrets me donnent le talent qui me manque, et la douleur l'éloquence que je n'ai pas. (source : éloge funèbre de Saint-Martin à Liège)


        

        

Air : Tenez, moi, je suis un bon homme.

Ici, quand vous daignez, mes frères, 
Sur la foi d'un serment d'honneur, 
M'admettre à vos sacrés mystères, 
Vous comblez les vœux de-mon cœur ; 
Mais, pour vous bien peindre mon zèle, 
Je fais un effort impuissant, 
Quand chaque frère offre un modèle, 
Je ne suis que de la SAINT-JEAN.

 

Pour concourir à cette fête,
Pour trinquer en cœur avec vous, 
Je n'ai pas besoin d'interprète, 
Et je sais vous entendre tous.
Oui, si de vos travaux mystiques 
Je me tire assez lourdement, 
J'ai mille vertus maçonniques .... 
Qui ne sont que de la SAINT-JEAN.

 

De Salomon l'auguste temple 
Vit naître nos premiers patrons, 
Et ce roi doit servir d'exemple 
A tous les zélés Francs-Maçons ;
Il eut, dit-on, de la sagesse
Et mille femmes.... tout autant....
Auprès de lui, je le confesse, 
Je ne suis que de la SAINT-JEAN.

 

A notre Vénérable Maitre
Je voulais offrir un bouquet, 
Quand bientôt on me fit connaître 
Que j'avais par trop de caquet :
Admirez, me dit chaque frère, 
Ses vertus ; mais, sans compliment, 
Pour l'éloge qu'on en peut faire, 
Vous n'êtes que de la SAINT-JEAN.

 

Pourtant je me croirais capable,
Et je le prouverai, morbleu !
En l'honneur du cher Vénérable 
De soutenir un triple feu.
Cessez donc, par des traits caustiques, 
De me détourner de ce plan ; 
Pour l'alignement des barriques,
Je ne suis plus de la SAINT-JEAN.

 

Si de ma muse téméraire 
Vous n'approuvez pas les essais, 
Par un silence salutaire 
Epargnez-lui quelques regrets. 
Sensible aux coups de la satyre,
Elle les craint dans cet instant ; 
De grace, n'allez pas lui dire 
Qu'elle n'est que de la SAINT-JEAN.

Retour au sommaire de la Triple Unité

Retour au sommaire du Chansonnier :